Histoire du code de la route

Le code de la route n’est pas une invention de notre époque à circulation intense

À tous les âges, avant, pendant et après la Révolution Française, il y eut des règlements, des instructions bien établis pour ceux qui devaient se servir des grands chemins ; ils se renouvelaient même assez fréquemment, car il parait que les voyageurs anciens se souciaient aussi peu de la police des routes que nos modernes charretiers ou conducteurs d’automobile.

Tous ces règlements sont curieux par leur style, par les informations particulières à certains usagers de nos grands chemins. Mais parmi eux tous, il est un règlement datant de la révolution, qui est singulièrement suggestif sur l’état d’esprit de certains riverains de nos routes et de certains usagers de ces mêmes chemins, usagers et riverains que nous rencontrons encore aujourd’hui, malheureusement aussi lents, aussi peu disposés à se déranger et à faire passer leur petit bien-être personnel et leur petite tranquillité égoïste après l’intérêt général. Ils prenaient déjà l’abus de la Liberté pour la Liberté même et se croyaient maîtres de disposer des chemins à leur gré, sous la révolution. Il est encore ainsi aujourd’hui. Les moeurs des hommes ne changent guère et celles des usagers de la route encore moins.

Puisse ce document apporter quelque consolation aux modernes usagers rapides de nos routes ! Ils verront qu’il y a eu cinquante ans ou presque, les charretiers, rouliers, portillons et autres conducteurs de voitures existaient déjà pour refuser de céder le passage, encombrer la voie, tenir leur gauche, avoir des chargements d’une largeur excessive ou instable, ignorer toute lanterne et même porter l’audace jusqu’à se permettre des injures , des menaces , des violences et des voies de fait et cela malgré le développement intense de la circulation et la naissance du tourisme à la fin du XVIII° siècle.
S’il en était ainsi il y a un siècle, il y a beaucoup de chances pour qu’il en soit encore de même au siècle prochain !
(mars 1930, Paul Cordonnier-Détrie)

Paul Cordonnier-Détrie, né en 1896 à Saumur. érudit, collectionneur & historien, il est pratiquement né avec l’avènement de l’automobile. C’est un témoin privilégié de l’évolution des nouveaux modes de transports routiers motorisés.
Son analyse et son jugement sur le partage de la route en 1930 sont d’une réalité saisissante. L’actualité de ses propos nous incite à la réflexion et à l’humilité.

Pourquoi rouler à droite

Comment la progression technique des armes et l’évolution des stratégies de défense à travers les âges ont-elles pu influencer le sens de circulation des automobiles modernes dans notre pays ?

Nos voisins insulaires, maîtres de la perfide Albion, ont-ils joués un rôle réel dans notre choix ? Et alors pourquoi ne les avons-nous pas imités, eux qui roulent à gauche ?

L’Homo auto sapiens étant un mammifère essentiellement droitier, a-t-il pu influencer de manière cognitive notre sens de circulation routière ?

Les procédures de conduite des véhicules hippomobiles ont-elles favorisées ce choix ?

Est-ce de la magie, de la superstition ? Quand on se souvient du latin qui propose de définir : « sinistra » pour la «gauche» et «dextra» pour la droite, les dieux nous ont-ils influencés ?

Est-ce une fois de plus la loi du plus fort qui l’a emporté, sachant que 90% des humains roulent à droite de nos jours malgré les vestiges du Commonwealth ?

La position du conducteur ou chauffeur dans ou sur son véhicule a-t-elle impacté le choix du sens de circulation ?

Toutes les réponses à ces questions nous apportent à leur manière une petite parcelle de vérité

Mais le fait historique qui valide définitivement le sens de circulation à droite dans notre pays, date du décret du 27 mai 1921, avec sa circulaire d’application du 30 mai 1921, instituant juridiquement le premier « code de la route » en France.

Le débat sur la sécurité routière fut lancé en 1903 suite à la tragique course routière Paris-Madrid du 24 mai qui fit près de huit tués et 20 blessés lors de la première et dernière étape stoppée à Bordeaux-Cenon sur décision ministérielle.

En 1909 la création d’une commission nationale pour élaborer le premier code de la route posa bien entendu la problèmatique du sens de circulation.

De manière plus ou moins implicite le sens de circulation était à droite depuis la proclamation du conseil exécutif provisoire du 30 mai 1793, l’an second de la république Française (Extrait des registres du directoire du département de la Sarthe, signé : Hamard, secrétaire général).

L’article premier précisait : « Les charretiers, rouliers et autres conducteurs de voitures qui fréquentent les grands chemins, tiendront invariablement leur droite, sans se détourner ni dévier, à moins qu’ils n’y soient forcés par quelque obstacle ; de manière que leur voitures et celles venant du côté opposé, qui tiendront aussi leur droite, passent respectivement, lorsqu’elles se rencontrent, à la gauche les unes des autres. »

Les usagers et certains règlements favorisaient souvent l’utilisation médiane de la chaussée également.

La loi du 30 mai 1851, socle partiel mais indiscutable du code de 1921, validait la conduite sur la droite de la chaussée.

La commission de 1909 puis la consultation sur le projet de code de la route de 1912/1913 ouvrirent un débat farouche sur le sens de circulation. Une proposition majoritaire fut exprimée pour une circulation à gauche à « l’anglaise ». Les partisans de la conduite à gauche argumentaient une accidentalité plus faible chez nos voisins Anglais en particulier pour les piétons (ce qui n’avait aucun fondement) et la position de conduite du siège conducteur automobile ou hippomobile. La commission inscrivit de ce fait dans son article 15 la proposition de circuler à gauche.

La guerre de 1914/1918 mit fin à ces commissions ainsi qu’à leurs propositions.

Après la guerre, grâce à un arrêté du 2 mai 1919, la « commission centrale des automobiles » fut chargée de terminer l’élaboration du code de la route et de finaliser le travail entrepris depuis 1903 et 1909, la fameuse proposition de l’article 15 préconisant le sens de circulation à gauche fut rejetée !

La règle fixant la circulation à droite des véhicules fut donc arrêtée définitivement par le décret du 27 mai 1921 instituant le premier « code de la route ». Sans la guerre de 1914/1918 peut être que notre pays aurait adopté la conduite à gauche !

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Le premier livre de code de la route

Le premier livre de code de la route comptait 5 pages et 10 articles en 1905. En 2012 il est composé de plusieurs volumes et de milliers d’articles et de pages.

Le commun des mortels n’a aucune chance de survie au milieu d’une telle jungle de lois, de décrets, d’arrêtés, de circulaires et j’en passe et des meilleurs. Et pourtant nul n’est censé ignoré la loi selon le fameux adage! D’où l’apparition depuis une dizaine d’années d’avocats spécialisés en droit routier.

Il est singulier de constater que le « code de la route de Jules Perrigot » est né vers la fin de l’année 1904. Il a été validé par l’Automobile Club de FranceVisiter le site de l’Automobile Club de France en février 1905 pour être distribué à ses adhérents et à tous les usagers. Le parc de véhicules motorisés en 1905 se composait d’environ 25 000 automobiles et de 31 000 motocycles.

Cette initiative privée a devancée le code de la route officiel (législatif et règlementaire) de près de 16 années. Ce n’est qu’en 1921, par un décret du 27 mai que fut promulguée « la règlementation de l’usage des voies ouvertes à la circulation publique » plus communément désignée comme « code de la route ».

Le code de la route de Mr Perrigot et celui de 1921 puisaient tous deux leur fondement dans la loi sur « la police du roulage et des messageries publiques du 30 mai 1851 » et dans le décret sur « la circulation automobile du 10 mars 1899 ».

Toutefois le code de Jules Perrigot, Vice-Président et membre fondateur de la Fédération des Automobiles Clubs Régionaux, introduisait deux concepts inexistants dans le socle de 1851 et de 1899 :

Article 4 : Croisements de routes, alinéa a « si deux voitures convergent vers le croisement découvert, le conducteur qui voit une voiture venir à sa droite doit lui céder le pas quelle que soit la largeur relative des routes ; il devra donc ralentir en conséquence et au besoin s’arrêter. »

Il généralisait la priorité à droite systématique et non pas en fonction de l’importance des voies de circulation abordées.

Article 7 : Accidents de personnes. En cas d’accident, il faut s’arrêter et porter secours dans toute la mesure du possible aux victimes de l’accident.

Article 8 : Une automobile croisant au moment de l’accident devra également s’arrêter pour offrir son assistance la plus complète aux blessés d’abord puis aux auteurs de l’accident toujours présumé involontaire.

L’article 8 préfigurait complètement la notion de non-assistance à personne en danger. Notion peu inscrite et peu développée à ce jour (1905).

Nous pouvons donc confirmer que le premier livre de code à destination du grand public est bien né en 1905 sous l’impulsion de Jules Perrigot et ce, 16 ans avant la naissance officielle et juridique du véritable « code de la route » du 27 mai 1921.

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Intégralité du code Perrigot
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